Séminaire acoustique et représentation

Séminaire acoustique et représentation

Introduire l’acoustique dans une école du paysage est une façon de se confronter à une nouvelle dimension sensible pour saisir la complexité et l’impermanence du vivant. Croiser les disciplines est une invitation à se décentrer pour pénétrer dans l’épaisseur du paysage.

L’objectif du séminaire “Acoustique et représentation“ à l’École de la nature et du paysage de Blois avec les élèves de DEP1 est de questionner l’appréhension, la compréhension et la restitution du paysage en s’appuyant sur nos capacités d’écoute et de décrypter ce qui relève des sons naturels ou ceux issus de l’anthropocène.

Repérer, hiérarchiser, spatialiser

Le premier jour est dédié au relevé sur site. En empruntant le parcours de La Roue depuis le lac de La Pinçonnière jusqu’à sa chute dans la Loire dans le centre-ville de Blois en passant au-dessus de son enfouissement, repérable par les quelques regards dans le parc de l’Arrou, l’arpentage dynamique est ponctué de pauses audio-graphiques. De façon libre, sans préjugés ni parfois même d’intentionnalité, l’objectif est d’expérimenter différents types de captations, graphiques et sonores, pour saisir ce phénomène physique, sensible et culturel, le son.

Guidé par la durée, l’espace et le mouvement, mais aussi par l’énoncé des caractéristiques des sons, l’exercice questionne les représentations à inventer pour dessiner ce qui ne se voit pas. La trace, la frise, la partition, la superposition, l’empreinte des impacts sonores et de leurs éventuels déplacements, la tonalité générale liée au climat, à la saison, à l’heure…, l’ensemble des perceptions cognitives et sensibles est convoqué.

L’oreille s’aiguise et au de-là de la reconnaissance de la source sonore, c’est bien l’ensemble des sensations traversées qui nous permet de nous positionner, à hauteur humaine et à 360°, dans le paysage, qu’il soit naturel ou urbain.

Le matériel d’enregistrement, mis à disposition des élèves pour une captation audio en mouvement stimule les élèves à tendre l’oreille et à saisir les ingrédients qui constituent le parcours et pour en comprendre les rythmes et les fréquences. Le jet d’un poisson sortant de l’eau, le timbre de la voix des promeneurs, les vibrations de l’air dans les végétaux, le chant des oiseaux, le gravier foulé par les pieds, le bruit sourd de la nationale, les raclements des machines de chantier, le bruit de la tondeuse au loin, les échos des voitures en entrée de ville et l’écoulement de l’eau canalisée sous la terre… deviennent les marqueurs tangibles du paysage sonore.

Traduire, concevoir, synthétiser

Le deuxième jour est dédié à un travail collectif en petits groupes. En s’appuyant sur les matières sonores et graphiques collectées, les élèves vont réaliser une restitution du parcours en imaginant des dispositifs mixtes qui connectent l’image et le son, la représentation plastique et sonore.

Les objectifs sont de synthétiser les ressentis, de scénariser le parcours, de concevoir la structure globale, d’élaborer les ingrédients graphiques et sonores, de s’approprier ensemble l’espace de la feuille et d’inventer au final une narration polymorphe pour dire le temps, l’espace et la durée.
Le son doit devenir dessein et le dessin résonner dans un mouvement synchrone indissociable.

Scénographier, Interpréter, donner à voir et à entendre

L’objectif de la dernière journée est de scénographier le dispositif, d’en proposer une interprétation incarnée et d’inviter le public à s’en saisir en lui donnant les clefs pour le comprendre.
Libres d’investir les différents espaces de l’école, les élèves sont conviés à mettre en scène leurs projets en choisissant les protocoles de leurs choix.

Que ce soit en incitant à effleurer les dessins pour parcourir le territoire et découvrir les textes et les sons créés à l’occasion ; en proposant une représentation devant une grande frise graphique pour entendre une partition sonore jouée en live derrière l’écran ; en conviant le public à une performance participative guidée par des consignes d’action ou en provoquant l’émotion par le bruissement d’une feuille de papier qui réagit aux ondes de la bande sonore, les différentes propositions ont permis d’aborder le son à différentes échelles comme une composante majeure de l’espace qui nous entoure.

L’interaction entre représentation et acoustique, introduite lors de ce séminaire, ouvre un champ d’action démultiplié et inspirant sur la compréhension et l’appropriation du paysage. Elle permet, par extrapolation, de s’interroger sur les autres phénomènes immatériels qui constituent la richesse des milieux.

Ces trois jours ont par ailleurs confirmé qu’associer acoustique et représentation représente une opportunité de stimuler nos propres imaginaires, nos paysages biographiques.

 Intervenants : Emile Boudghene, Claire Combeau, Frédéric Fradet

Avr 18, 2024 | Posté par dansActualités | Commentaires fermés sur Séminaire acoustique et représentation
Premium Wordpress Themes by UFO Themes