Etudiant : Raphaël Hannequin
Directrice de mémoire : Jacqueline Osty
Le patrimoine fracturé de Trignac : entre humble marais et exubérance industrielle passée, nouveau regard sur des oubliés du paysage.

Partagée entre Brière et estuaire de la Loire, entre ses origines rurales et son destin industriel, Trignac apparaît comme prise dans un dilemme. Progressivement fragmentée à partir de la révolution industrielle, soumise à la «superposition» de politiques très pragmatiques d'aménagement du territoire de Loire-Atlantique, régies par des impératifs avant tout économiques, la commune ne se "lit" plus. Administrée sous la politique du parti com­muniste, la ville semble à priori accueillir une population modeste voire précaire, dans des logements sociaux qui s’y développent encore aujourd’hui, et des petites maisons individuelles d’architecture «générique» et de volume parfois très réduits. Un seul repère distinctif visible à des kilomètres marque son «existence» derrière une façade franchisée : les forges abandonnées s’érigent et dominent l’horizon des marais.

Prit dans une véritable enceinte d'infrastructures routières (D213, N ...) et de flux de toute nature (canal du brivet et voies de chemin de fer associés aux anciennes forges), le centre ville repoussé à l'extrême limite Est du périmètre communal semble isolé, et ne peut que difficilement entretenir de relations, d'échanges avec son paysage environnant (notamment avec sa campagne et marécages brièrons, ses hameaux traditionnels), ni avec sa périphérie urbaine Sud en contact avec la ville de Saint-Nazaire . Il semble prit au piège, d'autant qu'en plus d'être peu visible ni suggéré, ses rares entrées prennent des airs de sortie d'autoroute, carrefours sans âme bordés de voies rapides. Historiquement, c'est aux anciennes forges, dont la superficie correspondait plus ou moins à l'actuelle zone industrielle, que l'on doit le rapide développement et une partie de la structure de cette cité ouvrière, empreinte du mouvement paternaliste du XIXème. Quelques corons subsistent, et surtout reste cette proximité immédiate entre habitat et nouvelles industries, introduites sur le site en grande partie démantelé des forges, et devenues l'une des façades de la commune (depuis la D213). De ce qui était autrefois un imposant complexe sidérurgique associé aux chantiers de l'Atlantique, seuls restent aujourd'hui quelques remarquables mais instables bâtiments (presque 30 mètres de haut sur pilotis) et rails d'approvisionnement en minérai, tout de béton armé et de briques. Un espace très fort, très scénographique, de belle architecture, un atout majeur que la ville s'intéresse actuellement à valoriser. Seulement si le site jouit d'une proximité au centre ville et d'une bonne visibilité, il reste néanmoins perdu au milieu des usines, et jouxte un canal que l'on ne peut approcher ni longer ... A cette superposition confuse d'espace de nature différente s'ajoutent d'autre enclaves plus informelles. De l'autre côté du canal à l'ouest, un terrain classé naturel sur le PLU en révision n'a pour quasi unique fonction que d'accueillir le camps de gens du voyage, pendant leurs festivités estivales tradi­tionnelles. Cet espace vide peut être considéré comme un prolongement du marais briéron. Puis au Sud de la D213 qui rejoint le pont de Saint-Nazaire en direction de Saint-Brévin, un terrain vagues classé AU (à urbaniser) au contact des quartiers périurbain de Trignac que l'on associe plus intuitivement à Saint-Nazaire, conserve le sillon de l'ancien cours du Brivet avant sa canalisation. Une succession d'espaces qui malgré leur proximité n'entretiennent aucun lien entre eux ni aucune continuité paysagère, car entrecoupés de lourdes infrastruc­tures. Ainsi déséquilibrée et mal desservie, Trignac semble oubliée, et m’apparaît comme livrée à son propre destin indépendamment de ses voisines de l’agglomération.
Je me propose donc de travailler sur ces trois derniers espaces perdus au milieu d’encombrantes infrastruc­tures routières, regroupant à eux seuls patrimoine industriel & mémoire collective, milieu naturel & habitat temporaire, délaissé à urbaniser, tous groupés autour du canal sur 2 problématiques majeures :

1. Comment, malgré les nombreuses limites physiques et obstacles, tisser des liens, redonner une cohérence paysagère et urbaine à la ville de Trignac dans son agglomération, abimée par une vocation trop longtemps tournée au service d’enjeux économiques extérieurs, au détriment de sa propre population et de son environ­nement ?

2. En quoi les vestiges des forges, garants du patrimoine majeur de Trignac, peuvent ils jouer un rôle dans cette «rationalisation» de l'espace fracturé de la commune, et contribuer à en améliorer le cadre de vie au bénéfice de ses habitants riverains et du patrimoine culturel régional ?

Enjeux : réfléchir à l’avenir de ces trois espaces autour du canal comme un ensemble voué à ouvrir, faciliter un dialogue entre Trignac et son patrimoine, ses communes voisines (dont Saint-Nazaire), et le paysage brièron.