Etudiant : Mathieu Delorme
Directeur de mémoire : Jean-Marc Gaulier
Provins : comment allier héritage médiéval et développement urbain ?

13 décembre 2001 : Provins est inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l'humanité par l'UNESCO au titre de la totalité de son périmètre urbain, et non de son seul centre historique.

Formidable consécration pour cette petite ville paisible et rurale de la Brie champenoise, aux confins de l'Ile-de-France (80 Km de Paris). Une reconnaissance mondiale à défaut de s'être fait une place à l'échelle régionale : la ville, aujourd'hui, se trouve malencontreusement à l'écart des grands réseaux de communication de l'Est parisien (le RER A et E, le TGV Est Européen, l'A4 et l'A5).
Au XIIe siècle, pourtant, l'Europe entière se retrouvait deux fois par an dans ce qui était alors la troisième ville de France. C'est à Provins que se déroulaient les plus importantes foires médiévales de Champagne, passage obligé des marchands venus des Flandres et d'Italie. La cité était alors composée d'une ville haute fortifiée, Le Châtel, bâtie sur un promontoire du plateau briard, et d'une ville basse, Le Val, à la confluence de la vallée de la Voulzie et celle du Durteint. Peu touché par l'urbanisation, l'industrialisation et la modernisation, le Provins d'aujourd'hui reste très proche de celui d'hier. La vie s'est accommodée du tissu médiéval, au fil de ruelles pavées souvent étroites et sinueuses.  La ville basse regroupe commerces et services publics alors que la ville haute, presque assoupie, est tournée vers le tourisme qui, depuis 2001, a bondi de 20 % (1 million de visiteurs en 2005). Quelques zones d'activités de faible emprise le long de la voie de chemin de fer (non électrifiée), un quartier de logements sociaux construits dans les années 1960 et la construction d'un hôpital moderne sont les seules excroissances que s'est accordée la ville hors de son tissu urbain d'origine. Provins va-t-il sombrer dans la ville-musée, haut lieu de la consommation par le regard et de la mise en scène des images du passé ? Déjà, tournois de chevaliers et ballets de faucons sur les remparts se produisent quotidiennement à la belle saison. Une tentation apparaît alors : profiter du "label" UNESCO et développer une véritable industrie touristique.

Cependant, le maire, Christian Jacob, attaché à un développement équilibré de sa commune, a engagé, depuis mars 2004, la ville et la communauté de commune dans un projet d'extension urbaine de 60 hectares, soit presque l'équivalent de la moitié de la surface bâtie de la ville existante. Cette Zone d'Aménagement Concerté (ZAC) se situera sur le plateau qui fait face à celui de la ville haute et comprendra 30 ha de logements en bordure du coteau boisé et 30 ha d'activités de l'autre côté de la RD 619. Comment donnera-t-il à voir et sera-t-il vu de la ville, des champs environnants ? Quels liens établira-t-il avec l'héritage médiéval ? N'est-ce pas l'occasion d'accorder patrimoine et modernité ? Mais comment ? Quels sens prennent-ils aujourd'hui ?

Ainsi, de par sa situation et son ampleur, ce projet interroge l'identité de la ville puisqu'il en modifiera profondément le paysage. L'ensemble de l'espace urbain de Provins est donc amené à se redéfinir pour mieux s'ouvrir vers l'avenir et se réinventer.