Etudiante : Valérie Parvais
Directrice de mémoire : Claire Dauviau
Les Costières de Nîmes : l’évolution d’un terroir vu à travers le site de Bellegarde.

Tenez, buvez une gorgée de ce vin des Costières de Nîmes. C’est un domaine St Marie des Costières rouge, cuvée marginale de 2004.
Regardez. Sa robe est d’un grenat profond et dense.
Humez. Son nez subtil aux notes de fruits noirs et d’épices est dominé par des traits balsamiques.
Goûtez. Son attaque est onctueuse. Les arômes balancent entre les épices, les petits fruits noirs et la réglisse. Une belle minéralité se développe au final révélant l’unicité de son terroir.
On me dit : boire ce vin c’est comme manger une poignée de terre des Costières… Je bois et je mange ce territoire.

Le site des Costières est un terroir viticole identifié, réglementé par un label AOC depuis 1986 et délimité physiquement en fonction de critères géomorphologiques et culturels.

C’est une terrasse en forme de croissant de 25 000 hectares situé sur 24 communes dans le département du Gard, entre les hauteurs des garrigues Nîmoises au Nord et la descente vers la Camargue au sud. Elles sont délimitées par les villes de Vauvert à l’Ouest, Avignon et le Rhône à l’Est.
Zone rurale, les activités y sont essentiellement agricoles avec des vignobles qui occupent encore la moitié de la surface, une production fruitière encore importante et de l’élevage (taureaux, chevaux, moutons).
On assiste cependant à un changement de l’occupation du sol. Avec une population qui ne  cesse d’augmenter, des zones pavillonnaires se développent à grands pas, grignotant les vignes, des friches apparaissent parmi les vignobles, tout au long des nombreux canaux qui irriguent ces terres, le maraîchage supplante peu à peu les cultures fruitières, les haies monumentales de cyprès sont abandonnées, les oliveraies, malgré deux appellations d’origine contrôlées, sont peu présentes.

Ce qui se passe sur l’étendue des Costières est encore plus flagrant sur la commune de Bellegarde. Située au milieu de la bordure sud des Costières, à cheval entre celles-ci et la Camargue, Bellegarde voit de même son espace se modifier par l’urbanisation, l’abandon et le changement des cultures mais également par d’autres facteurs, plus spécifiques à sa situation. Grâce à la présence d’une épaisse couche d’argile très imperméable, un important site d’enfouissement des déchets ultimes a vu le jour à l’ouest de la commune, sur le «penchant » délimitant la Costière de la Camargue. Des carrières (gravières) en activité ne cessent de gagner du terrain tandis qu’au fur et à mesure, en fin d’exploitation, elles sont abandonnées et deviennent étangs. Un important pôle de maraîchage et d’agriculture biologique (et biodynamique) se développe peu à peu depuis 20 ans.
On ressent le changement qui s’opère en découvrant la commune. On ne peut lire clairement ce qui s’y passe. On a perdu des repères, des lignes, on en trouve d’autres. Le croisement, l’interaction de ces anciens et nouveaux éléments apparaissent comme illogiques.

Nous sommes dans une période de transition, vers quelque chose que nous ne maîtrisons pas encore, dont nous ne voyons pas la finalité, dont le plan n’est pas établi. Vers où va Bellegarde ?
Un terroir ne saurait être figé. C’est un espace vivant et innovant qui ne se résume pas à la notion de tradition. Ce terroir des Costières a déjà évolué à travers les âges et changé de forme. Alors, continuerait-il de le faire sous nos yeux ou serait-ce des altérations irrémédiables faites à ce territoire identitaire?

Assisterions-nous à la nouvelle mue d’un terroir ou à sa disparition ?

Pouvons-nous, au lieu de seulement assister à cette évolution, l’anticiper, la prévoir, la planifier pour éviter ou remédier à d’éventuelles erreurs, organiser l’impact de ces changements, participer à sa mise en forme ? Et quelles formes cela peut-il prendre sur la commune de Bellegarde ?