Etudiante : Caroline Melot
Directrice de mémoire : Jacqueline Osty
Briançon, problématiques diales : entre ville haute et ville basse, carte postale et quotidien, France et Italie.

Briançon, sous-préfecture des Hautes-Alpes est rattachée à la région PACA. Cette petite ville de 10 740 habitants entretient un lien fort avec les vallées voisines italiennes. En effet, avant l ‘évolution des transports, les cols de montagne constituaient des portes vers l’Italie tandis que le massif des écrins, plus haut en altitude, représentait une barrière naturelle qui séparait le Briançonnais de la France. Encore aujourd’hui, bien que Briançon soit à égale distance entre Grenoble et Turin, l’accès vers Turin reste le plus rapide.
Le département vit essentiellement grâce au tourisme, au rythme des saisons d’activités été/hiver et des « hors saisons » printemps/automne plus calmes. Si bien que dans une ville comme Briançon, on peut avoir l’impression qu’il existe deux villes : l’une, telle une carte postale, est dédiée aux visites touristiques, tandis que l’autre, fonctionnelle, est vécue par les habitants. En effet, la vieille ville fortifiée retrace aujourd’hui sur ses lignes de crête et à l’intérieur de ses remparts l’histoire d’une ville limitrophe. Cette cité intra-muros, renforcée au fil des innovations de guerre par une succession de forts, dominait et protégeait les trois vallées agricoles en contre bas. Aujourd’hui sa silhouette forme un point de repère, un emblème qui projette son aura bien au-delà de la ville et du massif alpin. En outre, les Briançonnais qui n’y travaillent ou n’y habitent pas, c’est-à-dire la majorité, ne s’y rendent presque jamais. Cette image forte présente donc un côté illusoire, telle une identité falsifiée.
Aux pieds de la forteresse, il n’y avait que quelques maisons puis des hameaux implantés au milieu de terres agricoles. C’est seulement à l’époque industrielle, avec l’implantation de l’usine de soie, appelée la Schappe, que la ville basse s’est développée. à travers ses ouvriers, cette usine renforça la double nationalité de la ville, fonctionnant avec une main-d’œuvre aussi bien française qu’italienne. La Schappe fait encore partie du quotidien des habitants : le marché se déroule sur le parvis d’un de ses bâtiments désaffectés, et le parc juste en arrière. Aujourd’hui, la ville basse supporte beaucoup d’infrastructures lourdes pour assurer l’autre forme de tourisme : un téléphérique, des complexes sportifs, une zone industrielle, un casino, des centres de cures. Cela assoit son dynamisme économique, mais lui donne une qualité troublante : elle n’est ni belle, ni désagréable. En  effet, son centre-ville est morcelé, sans identité, mais le piéton et l’automobiliste s’y côtoient sans problème. La rivière de la Durance passe des gorges vertigineuses à un canal de béton, en quelques mètres. Sa rive droite n’est accessible que sur une toute petite portion alors qu’elle supporte l’ancien moulin de la ville. L’usine a laissé au cœur de la ville des traces appréciées par les habitants, mais regroupées autour d’un délaissé, cachées derrière de longs murs. La zone industrielle formant la porte sud de la ville est en partie en zone inondable, alors que la prévention des risques fait partie du bagage culturel montagnard. Cette ville basse s’est donc développée selon les contraintes liées à ses fonctions, mais elle semble avoir oubliée que les habitants ne sont pas seulement des usagers. Ils représentent également des histoires, des sensibilités, ils ont un besoin intime de rêves et d’identité pour vivre et dynamiser le territoire.
L’hostilité naturelle du site a orienté l’évolution de la ville vers un caractère dial, entre opposition et complémentarité, ville haute et ville basse, cigale et fourmis. Faut-il chercher un équilibre entre les deux villes ? Les traces du passé industriel peuvent-elles recoudre le tissu urbain ? Quel peut-être le rapport entre la ville et la Durance ? Qu’en est-il de l’identité franco-italienne ? Briançon s’est implanté dans un lieu enclavé dont elle a tiré une science de l’économie d’espace. A-t-elle disparu ? Le milieu naturel, aussi pur que dangereux, est-il seulement devenu un produit commercial exploité par les habitants ?
Des usagers rêveurs, une carte postale humble
Le tourisme en carte postale
Des habitants.