Etudiante : Laura Jamet
Directrice de mémoire : Claire Dauviau
Bibracte, faire germer la rêverie d'un paysage.

Le point de départ de mon diplôme a été un intérêt particulier pour les manières d'habiter un territoire qui, de tous temps, ont sculpté les paysages. Il me semble que nous avons beaucoup à apprendre de l'implantation des civilisations passées et de leur façon d'appréhender leur(s) lieu(x) de vie. La mémoire et la connaissance de ces éléments est primordiale : elle participe de l'élaboration d'un socle culturel et historique commun, et permet de comprendre les origines de nos paysages afin d'imaginer ensuite leur dessin futur.
Comment rendre lisibles et compréhensibles, aux regards plus ou moins initiés, ces «paléo-paysages» et les pratiques humaines qui leur sont associées ?

J’ai imaginé mon site d’étude comme un laboratoire pour répondre à cette question. Pour cela j’ai choisi de travailler sur le site de Bibracte, dans la région de Bourgogne, à cheval sur le département de la Nièvre et celui de la Saône-et-Loire. Il s’agit d’un site archéologique, perché au sommet du Mont Beuvray (820m d’altitude), lequel domine la vallée de l’Arroux. On se trouve au coeur de la forêt morvandelle, à la pointe sud des petits sommets rebondis du massif du Morvan.

Pourquoi Bibracte ?

Une capitale oubliée.
Du Ier siècle av JC au Ier siècle de notre ère, Bibracte était une agglomération gauloise puis gallo-romaine majeure, d’un peu plus de 200Ha, cerclée de remparts imposants, dont les remblais coiffent toujours le sommet du Beuvray. Il s’agissait de la capitale du puissant peuple gaulois Eduens, regroupant peut-être jusqu’à 20 000 âmes. Son rayonnement local, à l'échelle des échanges du monde antique, était très important ; les paysages étaient alors ouverts car activement cultivés et habités. Cependant, cette apogée a été de courte durée, car subitement à la fin du Ier siècle après JC, l’activité fourmillante de Bibracte s’est vue transférée à quelques kilomètres, à Autun, nouvelle capitale.

Un pôle archéologique au coeur d’un territoire endormi.
Depuis, Bibracte et sa campagne sont tombées progressivement dans l’oubli et n’ont jamais été réinvesties de façon aussi intensive. Désormais, le Mont Beuvray est endormi sous un épais manteau boisé, et le territoire environnant (très peu habité ou exploité) semble oublié, à l’écart des réseaux. Pourtant, ce lieu reste majeur, mais pour d’autres raisons: c’est un site archéologique d’importance nationale et internationale. Depuis la découverte du site à la fin du 19ème siècle, les fouilles archéologiques ont permis de mettre à jour un urbanisme celte et d’établir l’existence d’une première forme de civilisation à l’échelle européenne: la «civilisation des oppida». Le site est géré par l’établissement Public de Coopération Culturelle, l’EPCC Bibracte, chargé d’organiser les campagnes de fouilles, mais aussi le fonctionnement du centre archéologique européen installé dans le village voisin de Glux-en-Glenne et du musée, construit en 1995 sur le versant nord du Mont Beuvray.

Aujourd’hui, Bibracte est donc avant tout le domaine privilégié des archéologues. Bien qu’il y ait eu des tentatives pour donner à voir les résultats des fouilles, les vestiges restent peu compréhensibles, surtout aux regards non initiés, et on ne peut imaginer ni l’ampleur ni l’organisation de la capitale gauloise.

Les questions se dessinent alors : comment le site de Bibracte peut-il faire germer une rêverie collective à travers la révélation des traces visibles et invisibles de cette occupation humaine ancienne ? Comment l’association de l’archéologie et du paysage peut-elle devenir une clé de lecture de l’implantation gauloise ?

Laissons parler l’histoire et faisons place à la poésie !