Etudiante : Léa Muller
Directeur de mémoire : Marc Claramunt
Strasbourg, Glacis Ouest : les coulisses de la ville.

Dans les contours même de la ville, il est de ces lieux qui n’ont ni forme, ni vocation particulière; de ces lieux qui ne se définissent que par le manque ou par leur négatif. Entre formes et infrastructures urbaines, ils sont les oubliés de la ville, on les qualifie alors d’entre-deux ou de délaissés.



A Strasbourg, ces espaces naissent, sur plus de trois kilomètres de long, au Glacis, à l’ouest de la ville entre le centre et les faubourgs de Cronenbourg, Koenigshoffen et la Montagne Verte. Au cours du temps, l’évolution spatiale de la cité n’a fait que générer une coupure physique de plus en plus nette entre les deux entités. Successivement, trois demi-cercles concentriques se sont dessinés entre Strasbourg et sa proche banlieue.

Aussi, à l’époque de Vauban, les remparts ont imposé une première limite (le terme “glacis” fait d’ailleurs référence aux talus qui s’étendaient autrefois en avant des fortifications) ; on doit à la révolution industrielle l’apparition de la gare centrale et du réseau de chemin de fer qui l’accompagne ; et aux années 60 celle de l’autoroute. Morcelant le territoire, ces infrastructures accélèrent un mouvement nord/sud très prononcé, au détriment des rapports est/ouest.

Si les anciens faubourgs font aujourd’hui partie intégrante de la communauté urbaine de Strasbourg, ils n’en sont pas pour autant plus liés, au contraire. Aujourd’hui, de part et d’autre des infrastructures, toute activité spécifique a été abandonné. Et pourtant, il n’y a pas si longtemps, alors que la ceinture extérieure était dédiée à une agriculture péri-urbaine de maraîchage, la couronne intérieure était le quartier industriel le plus moderne de Strasbourg, composé d’immeubles de rapport et d’activités variées : industries (habillement, ameublement, petite mécanique), ateliers d’artisans, entrepôts, commerces de gros,...La vocation maraîchère s’arrête définitivement après le siège de 1870. Puis, entre les deux guerres, c’est le quartier industriel qui est dévalorisée aux yeux des investisseurs. Ces deux activités se déplacent alors à l’extérieur de la ville et laisse derrière eux des espaces qui s’enfrichent.

Sans stratégie globale, cet espace souffre aujourd’hui d’une difficile lisibilité. Toutes sortes d’infrastructures “indésirables” (parkings et camping, terrains de foot, cimetières et garages,...) y sont reléguées sans cohérence aucune, ni entre elles et ni avec le territoire.

Par ailleurs, dans les années 60, les faubourgs voient aussi la construction des plus grandes cités d’habitat social de Strasbourg. De grandes inégalités sont alors concentrées dans les quartiers périphériques, gravitant, sans réelle accroche, autour du noyau strasbourgeois. Il pèse ainsi un enjeu social fort en ce qui concerne les connexions physiques et psychologiques entre ces banlieues et le centre ville.

Cependant, si cet espace souffre de beaucoup de maux, il n’en est pas pour autant dénué de toute poésie et de caractère. En effet, de part et d’autres des infrastructures, se cachent, même aux yeux des Strasbourgeois, les fragments au visage multiple d’une richesse. D’un côté, les remparts et les anciens bâtiments industriels confèrent une identité historique très prononcée au lieu; de l’autre, un patrimoine naturel sommeille, entre les cours d’eau, les jardins ouvriers et les dernières parcelles agricoles. Ajoutons que les remparts sont aujourd’hui la propriété de l’armée mais qu’il est question de les ouvrir au public. Ce lieu ouvre ainsi différentes perspectives de développement durable pour la ville.

Enfin, il faut insister sur la position stratégique de ce site, qui en fait un lieu d’avenir. Le Glacis est, en effet, en plein coeur de l’actualité strasbourgeoise. L’arrivée du TGV, en juin 2007, dynamise et revalorise fortement le secteur. Par ailleurs, le Plan de Déplacement Urbain qui est en cours fait part d’une volonté politique très forte de travailler de nouvelles connexions vers l’ouest (notamment par l’intermédiaire d’un tram train). Le site même de la sncf est également en pleine mutation. Les terrains qui correspondent à la “gare basse” devraient revenir à la communauté urbaine de Strasbourg, libérant un foncier considérable.

Aussi, de nombreux enjeux, de natures très différentes pèsent sur ce territoire. Quel avenir imaginer pour cette ceinture, de part et d’autre des infrastructures? Quel rapport instaurer entre la ville et les périphéries? Comment s’affranchir du mouvement  nord sud pour créer une nouvelle perméabilité est ouest?