Etudiante : Anne Badrignans
Directeur de mémoire : Jean Grelier
Site de l’ancien camp de Pithiviers : la reconquête d’un espace meurtri.

Certaines parties de notre territoire sont meurtries par les épisodes tragiques de l’Histoire. 
Malgré le temps passé, de nombreux lieux gardent en leur sein des stigmates profonds révélés par le témoignage des survivants. Ce devoir de perpétuation qui s’est transmis jusqu’à ce jour par oral est amené à disparaître dans un délai proche. Il est progressivement remplacé par l’art de l’Artefact encombré par l’objet (musées, monuments aux morts) et par « l’obsession » commémorative par peur de l’oubli.
Aujourd’hui, de nombreux sites devenus trop artificiels sous le phénomène de la muséification ont perdu leur pouvoir d’évocation.
Une autre tendance inverse est constatée : la dissimulation de la blessure par l’implantation d’un nouveau territoire pour gommer le passé, pour nier sa présence.
Mais la mémoire est un vécu en perpétuelle évolution, fragile, à la frontière du souvenir et de l’amnésie. Conserver la mémoire des lieux, c’est raconter l’Histoire pour transmettre aux générations futures le témoignage des évènements qui s’y sont déroulés. Ce devoir de mémoire est nécessaire, mais aujourd’hui, il n’y a pas vraiment de réponses apportées, ou celles proposées ne sont pas en adéquation : banalisation, peu d’implication des nouvelles générations.

Pithiviers,
Petite ville prospère du Loiret, un centre urbain accueillant.
En poussant un peu plus loin la déambulation, en sortant du cœur urbain, c’est un tout autre visage que la ville dévoile. Juste là, à portée du regard, une longue avenue débouchant sur une gare quasi déserte où passent encore quelques wagons de marchandises. Une odeur prononcée de sucre émanant des usines flotte dans l’air.
Une atmosphère pesante règne en ces lieux.
C’est ici, qu’entre 1939 et 1942 furent internées plusieurs milliers de personnes juives, en attente d’une expédition finale vers le camp d’Auschwitz.
Ce camp a aujourd’hui disparu. De ce lieu, il n’en reste que le nom. Des pavillons et quelques stationnements y ont été implantés. Près de ce lieu, on distingue les usines, les bâtiments destinés à l’exploitation de l’industrie céréalière, puis la plaine sur laquelle viennent se dessiner les masses imposantes des usines sucrières. Au sol, des rails entrecroisés apparaissent, accentués par la platitude de la Beauce. à cet endroit, la terre semble stérile, la friche y pousse péniblement.
Tout rappelle la présence du camp, mais d’une toute autre manière. C’est une mémoire en négatif que nous révèlent les lieux, non pas à partir du camp lui-même, mais par ses abords et les éléments environnants ayant été en lien avec ce dernier.
Ici, le vide génère le plein. La plaine, les rails et leur friche, le vrombissement permanent des usines. Rien de plus dans ce paysage lourd et inerte.

L’objet de mon travail consiste en l’étude et les rapports entre le site de cet ancien camp et son environnement, afin de permettre la reconquête de ce site meurtri, cristallisé sur son passé.
Comment révéler les éléments de mémoire présents sur ce site, tout en permettant de faire évoluer les paysages alentours ?
Comment sensibiliser sur ce territoire lorsque ce dernier est vécu au quotidien ? Comment vivre avec ce  territoire meurtri ?
Comment permettre aux habitants de s’approprier les lieux ?

Quels modes référentiels à trouver pour que Passé, Présent et Futur puissent cohabiter sur ce même territoire ?