Etudiante : Julie Martineau
Directrice de mémoire : Claire Dauviau
LE CANAL DE ROUBAIX

à l'est de Roubaix, les quartiers populaires de l'Hommelet et du Hutin, accueillent un ouvrage considérable, vestige délaissé de l'ère industrielle du nord : le canal de Roubaix. Imperceptible depuis le tissu urbain, ni même depuis les ponts routiers qui l'enjambent, tant elle est enfoncée dans son lit bétonné, la présence de l'eau ne se révèle qu'en longeant les quais : ce n'est qu'au bord de l'eau du canal que l'on prend conscience de la respiration que procure ce vaste espace, ouvert sur le ciel. L'effet produit est d'autant plus remarquable que le canal est situé au cœur de quartiers denses, dans une ville qui n'accueille par ailleurs aucune rivière. Mais cet espace, résolument inscrit dans un large couloir, que définit l'alignement du bâti, y est enfermé et isolé, il marque une fracture entre les quartiers, qui se tournent le dos.

En essayant d'intégrer les nouveaux usages tout en conservant le patrimoine historique, deux époques et deux manières de penser la ville, la ville se superposent, sans réellement se reconnaître. Ainsi, le déplacement des pôles économiques et l'élargissement du réseau routier, permettent à la ville de se développer, mais contribuent également à isoler certains quartiers, qui se trouvent "piégés" dans ce nouveau maillage urbain; le canal de Roubaix accentue encore plus cet isolement. En tant qu'ouvrage du passé aujourd'hui obsolète, comment se justifie la présence du canal sur cette nouvelle trame d'usage ?

Comment réconcilier la force symbolique de l'eau et la force symbolique d'un ouvrage artificiel, créé dans un souci économique ? Consciente de la valeur de "son" canal, la ville de Roubaix a obtenu de le remettre en navigation. Trait d'union entre la France et la Belgique, sa vocation devient touristique ; il permettra alors de relier la métropole lilloise à la campagne belge par le transport fluvial, il prendra ainsi une ampleur européenne. Cette entreprise s'accompagnera naturellement de l'entretien du canal, et de la mise en valeur de ses abords, lui accordant une "seconde vie". Mais sa nouvelle fonction ne correspondra qu'à une pratique linéaire de navigation ou de promenade, sans tenir compte des usages transversaux.

Pour qu'un tel ouvrage ait encore une raison d'être à Roubaix, il me paraît nécessaire d'ouvrir des "portes" de ce couloir vers les différentes "pièces" de la ville, de relier le canal aux autres espaces ouverts existant dans ces quartiers, et d'en révéler la lumière que l'eau sait si bien réfléchir.

C'est en essayant d'étendre la perception de l'eau au cœur des quartiers, et de rompre la rigidité rectiligne du canal, que celui-ci pourra s'adapter aux rythmes urbains actuels. C'est ainsi que la richesse du passé communiquera avec le présent en construction.